• TransEurope/Vendée Globe : même passion de la course en solitaire.

    Vendée Globe J-14, TransEurope J-175.

    Je viens de lire une interview d'un skipper engagé sur le Vendée Globe et je n'ai pu m'empêcher de faire un parallèle entre sa future aventure autour du Monde à la voile et la mienne du Sud au Nord de l'Europe en courant.

    Toutes proportions gardées, la TransEurope est à la course à pied ce que le Vendée Globe est à la voile.
    Il existe un premier point commun : la fréquence de leur organisation, tous les 6 ans en ce qui concerne la TE-FR et tous les 4 ans pour le Vendée Globe.
    Autre point de ressemblance : le nombre de postulants, même si le double de concurrents prendront le départ de la TE-FR par rapport au Vendée Globe, ça reste des épreuves "à dimension humaine".
    Il existe des compétitions moins longues et qui servent souvent de préparation à ces grandes aventures : la traversée de l'Atlantique (Route du Rhum ou autres) me rappelle la Transe Gaule, la Solitaire du Figaro me fait penser à ces courses de 6 jours ou aux courses à étapes n'excédant pas une semaine. Les régates ne sont pas sans rappeler les 10km ou autres semis et marathons...
    Il y a tant de similitudes entre ce qui est organisé en voile d'un côté et en course à pied de l'autre que d'en faire la liste serait fastidieux.

    Une constante, j'oserai même dire une ressemblance, entre ces deux sports : l'envie de se retrouver seul face à soi-même.

    J'ai repris l'interview de Yann Eliès (skipper de Generali) effectuée par Olivier Clerc, journaliste à Ouest-France (article du dimanche 26/10/2008), pour me mettre à leur place, sans aucune prétention de ma part, juste par envie de m'amuser.
    Je suis l'intervieweur et l'interviewé, j'ai adapté quelques questions et apporté mes réponses sans plagier celles de Yann Eliès dont les réponses dont je me suis inspiré ou que j'ai recopiées intégralement apparaîtront soulignées, même si certaines correspondent à ce que je ressens et ressemblent à ce que j'aurais répondu).

    "Fabrice Viaud, comment appréhendez-vous cette dernière ligne droite avant de prendre le départ  de la TransEurope ? (Nota : imaginons-nous à la mi-avril, juste avant de prendre l'avion pour Bari).
    C'est la semaine des dernières fois avant juin. Dernière fois que tu fermes l'ordinateur de ton bureau; que tu fais ton sac; que tu quittes Rezé et ta petite famille, que tu déjeunes dans ta cuisine, assis à une table; que tu dors dans un vrai lit; que tu prends une vraie douche chaude...
    Toutes ces journées sont empreintes de nostalgie, marquent une sorte de clap de fin. Ce qui est sympa c'est de se dire qu'on tend vers l'objectif fixé avec toute la famille il y a deux ans. Avant d'en découdre, de passer du temps sur la route (la meilleure partie du projet), l'idéal est d'essayer de ne pas regarder ce qui se passe à côté, d'éviter de se laisser influencer. Il y a une soixantaine de coureurs, donc autant de conceptions différentes de la traversée de l'Europe en course à pied...

    La petite musique qui peut gagner l'esprit est dangereuse !
    Il n'est pas bon de s'interroger sur ce dont on était sûr quelques secondes plus tôt. S'il reste le moindre doute dans la préparation, on a tendance à remettre en question certains choix et cela induit du stress inutile. C'est la raison pour laquelle j'ai tout préparé en vase clos, en m'appuyant sur mes propres compétences pour chasser tout risque de doute.
    Les jours qui vont précéder le départ de Bari vont constituer la joie de se retrouver : beaucoup d'entre nous se sont déjà cotoyés sur des courses à étapes, notamment la Transe Gaule et la DeutschlandLauf.
    Tous les choix étant faits, c'est l'occasion de discuter plus librement. Et de faire la fête ce qui est, à l'instar du milieu nautique, une tradition en course d'ultra longues distances.

    Si vous deviez vous qualifier...
    Prudent, méthodique, ne laissant de place ni au hasard ni à l'à-peu-près, bouffeur de kilomètres, dur au mal, expérimenté... tout cela venant compenser des limites physiques certaines. Je suis loin d'être un athlète même si je pratique l'athlétisme. "Prévoir l'imprévisible" est nécessaire sur ce genre de courses à étapes.

    J'ai acquis une certaine expérience lors de mes quatre Transe Gaule. Je suis passé par tous les états :
    - imprudent lors de ma première traversée, en 2005, découvrant ce que c'était que de souffrir en raison d'une mauvaise gestion des premières étapes où "généralement tout va bien avant de rentrer dans le cycle infernal des douleurs et blessures", mais découvrant aussi ma capacité à endurer le mal et à outrepasser les douleurs; c'est néanmoins l'édition dont je garde les meilleurs souvenirs au niveau "humain" et celle où j'ai le plus d'amis;
    - prudent lors de ma seconde Transe Gaule, en 2006, où j'ai appris la frustration nécessaire à ce genre de courses de longue durée afin de terminer frais et sans bobos; courir avec le frein à main n'est pas chose facile, beaucoup ont payé pour ne pas avoir suivi ce passage que je qualifierai d'obligatoire en course d'ultra;
    - serein sur la troisième, en 2007, où, après avoir constaté qu'à vitesse supérieure j'étais moins fatigué que l'année précédente, j'ai pu donner le meilleur de moi-même sans retenue (c'est l'édition dont je conserve les meilleurs souvenirs au niveau sportif, terminant souvent dans le top 5);
    - ambitieux sur la quatrième, en 2008,  où, après m'être rendu compte à nouveau de mon état relatif de fraîcheur après plusieurs étapes courues plus vite que l'année précédente, j'ai encore pu me tester afin d'obtenir des repères qui me serviront lors de la TransEurope; je me suis rôdé, sachant qu'après les dix-huit premiers jours, il y en aura encore quarante-six !

    Avoir couru quatre Transe Gaule avec beaucoup des futurs concurrents à la TransEurope constitue un avantage !
    C'est un peu comme si j'avais déjà vu le film. La trame du scénario va être identique à celle de la Transe Gaule. Les avant et après étapes, la convivialité et l'entraide, le respect de chaque compétiteur ne seront pas différents, la communication sera plus facile car nous nous connaissons déjà. Après, les scènes seront différentes car je pars sur des routes que je ne connais pas, dans des pays que je ne connais pas ou peu (l'Allemagne), je ne connais pas non plus les gymnases, je ne pourrai pas systématiquement trouver une épicerie ou tout autre commerce pour refaire le plein de nourriture ou d'autre matériel afin de changer de l'ordinaire.
    J'ai rencontré Ingo, l'organisateur, et son staff. Je sais que l'organisation est très "professionnelle" et que nous ne serons pas lâchés comme ça dans la nature.

    Quelle idée vous faites-vous de la course ?
    Pour ce qui concerne le road-book et le flêchage, je sais à quoi m'attendre, il faudra juste être un peu plus attentif que sur la Transe Gaule où je finis par connaître tous les coins et recoins et autres subtilités de l'itinéraire. Là, en Italie par exemple, il ne faudra pas se râter. Tous les chemins mènent peut-être à Rome, mais la TransEurope n'y passe pas !
    J'ai déjà effectué un prédécoupage "mental" de la TE-FR09 : je me donne les 17 premiers jours, en Italie, pour me régler. C'est un "format Transe Gaule", puis 2 ou 3 autres jours afin de bien franchir les Alpes et enfin les 14 suivants qui vont me faire atteindre la Suède en 33 jours et 2244km (moyenne quotidienne de 68km). Je pense que ça devrait se faire sans trop de soucis pour peu que je conserve ma ligne de conduite qui est basée sur la prudence et la récupération.
    La suite, ce sera une autre histoire : les 25 ou 26 étapes en Suède seront plus longues (72km en moyenne quotidienne, avec 6 à plus de 80km voire plus de 90), le paysage et les routes ne se prêteront peut-être pas facilement à accueillir des coureurs, il faudra sans doute toujours être sur le qui-vive ce qui est exténuant à la longue. Sans parler de la météo, des moustiques, des jours de plus en plus longs...
    Mais pas de panique, on verra ça en temps voulu.

    Je n'ai pas d'ambition au classement pour plusieurs raisons. La première tient au fait que je veux aller au bout de la TransEurope et il ne me servirait à rien de griller mes cartouches prématurément à essayer de "faire une place". J'ai pu observer sur la Transe Gaule que la hiérarchie s'installe dès les premiers jours et que, sauf abandon de certains coureurs, elle ne varie plus beaucoup par la suite. La seule différence  c'est qu'avec la Transe Gaule on peut accélérer après 10 ou 12 jours quand on sait qu'il ne reste qu'une semaine de course, tandis que là, si au bout de deux semaines on se lâche, on risque d'aller dans le mur.
    La seconde raison tient au niveau des performances des coureurs : une grande majorité, en plus d'être très expérimentée sur ce genre de course, possède un palmarès et des références de très bon niveau sur toutes les courses d'ultra. Plusieurs internationaux ou ex-internationaux seront au départ, sans compter les "professionnels".

    Comment vous préparez-vous à cette solitude au long cours ?
    La clé, c'est le plaisir. Il ne faut pas partir comme on partirait au front, en imaginant qu'on va souffrir. On a la chance d'avoir des vies trépidantes. Alors il faut être capable de relativiser la tenue trempée, les chaussures gorgées d'eau, la fatigue, les petits bobos (ampoules, frottements, tendinites...), les petits chagrins, en se disant : "Tu es là où tu as toujours rêvé d'être, donc profites-en." Il faut considérer que c'est comme un rêve éveillé, à faire durer le plus longtemps possible. C'est à dire jusqu'à l'arrivée.
    Cela reprend les deux adages qui figurent en tête de mon blog :
    " Vivre ses rêves plutôt que rêver sa vie."
    "Les douleurs passent, la fierté reste."

    C'est quoi être coureur d'ultra sur de si longues courses à étapes ?
    C'est un peu comme être un vieux garçon. J'essaie de tout ritualiser dans mes gestes quotidiens : du lever au départ de l'étape, de l'arrivée au coucher. Et même pendant les étapes.
    A chaque poste de ravitaillement je procéderai de la même manière, essayant de ne pas trop y perdre de temps, car "lorsqu'on est arrêté, on n'avance pas" comme se serait plu à dire un certain Pierre Dac, lointain cousin de Monsieur Lapalisse.
    Chaque lieu d'hébergement, gymnase ou salle des fêtes ou autre, sera mon "chez moi" pour le court temps où j'y serai installé et là, personne ne pourra venir me déranger, m'empêcher de récupérer... et me préparer pour la suite de l'aventure."

    Pour ce qui concerne les similitudes entre nos deux épopées, je précise quand même que je ne dispose pas de supports médiatiques et financiers comme ceux de Yann Eliès, mais on peut quand même se prendre à rêver qu'un jour un sponsor s'intéresse à l'ultra et devienne le partenaire d'un coureur.

    à+Fab****
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